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 Echoes

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Date d'inscription : 21/07/2017

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MessageSujet: Echoes    Echoes  Icon_minitimeMer 5 Fév - 3:01


De temps à autre, les cauchemars reviennent. Axel n'est pas tout à fait sûr, toutefois, qu'ils ne soient pas également des rêves. Des éclats de souvenirs éparpillés, des instants figés dont les contours semblent se mouvoir en permanence, comme des passagers fugaces dans sa mémoire incertaine. Ils sont rassurants et solitaires en même temps, agréables mais pénibles, confus mais affermissant. Des échos d'un temps disparu ou espéré, pour lui, ça ne fait pas beaucoup d'importance. Axel s'en fiche un peu, de ce qui est vrai ou faux ; ce qui lui importe est uniquement ce qui est vrai pour lui. Et, malheureusement, il ne croit vrai que ce qui l'arrange et le conforte dans ses certitudes.
Après tout, pourquoi diable aurait-il eu jamais à s'embêter de tout le reste ? Il n'avait jamais vraiment été contredit, et il n'avait non plus eu le besoin de se préoccuper outre mesure de tout ce qui ne faisait pas partie de son petit monde ; tout ce qu'il désirait était donc de le conserver et de le maintenir, de cacher tout ce qui aurait pu ressembler à une fêlure, de combler les vides qui auraient pu le faire douter. Alors il arrange ses souvenirs, redessine les figures dans sa tête, enjolive, dissimule à son propre esprit tout ce qui semblait bien moins lumineux que ce qu'il désire, sans grand remord. Axel ne veut pas comprendre : il veut écraser ses doutes sous le tapis et ne plus y penser, car il n'y a que comme ça, estime-t-il sans même y penser, qu'ils disparaîtront et qu'il sera satisfait.
Axel a passé sa vie entre les tours les plus éloignées du quotidien, entre les salons et les pièces isolées de tous regards et paroles étrangères, intruses, contradictoires. Dans le confort et la tranquilité rassurante des privilèges et de l'absence totale d'inquiétude pour les banalités du quotidien, lové dans le tissu des feutré des canapés les plus doux et passant de paisibles matins dans des matelas moelleux. Il a vécu entre les masques et les implicites, les secrets et les conversations à mi mot : alors pour lui, rien de plus naturel que de chercher à corriger la tâche sur le tableau qu'il voudrait avoir aussi impeccable que dans ses souvenirs flou et partiels.

En rajustant mécaniquement ses gants, son regard marron se fixe sur les images enregistrées par les caméras, ses iris fixant toujours la silhouette masquée, élancée et rapide passant avec une aisance et une agilité maîtrisée entre les  hauteurs sans une quelconque crainte apparente d'une chute qui ne vient de toute façon pas. Ses mâchoire, inconsciemment, se crispe un peu plus fortement contre la friandise qu'il gardait jusque là en bouche.



La jungle est dense, profonde, humide, austère. Dangereuse, même, avec toutes les créatures qui y ont trouvé un refuge depuis que la désolation des terres les plus exposées les ont forcé à émigrer si elles ne voulaient pas périr. La rivière d'émeraude qui la traverse est peut-être la chose la plus jolie qui s'y trouve, mais il a appris bien vite que sa beauté ne cachait qu'une laideur bien plus sinistre. Ses pas écrasent la mousse sous ses bottes, relevant de temps à autre le regard pour observer l'endroit d'où semble dégueuler le flot aqueux, dépourvu de la moindre vie, du moindre animal ou du moindre pokémon. Il n'avait jamais eu l'occasion de voir beaucoup de photographies du Tulus « d'avant », mais il se rappelle, sur des cartes postales qu'il avait pu trouver en fouillant une maison vide ou deux, que la rivière ne semblait pas si vide, avant. La végétation, toutefois, semble maintenant si dense et épaisse, comme prête à étouffer tout ce qui s'y arrêterait ; il est presque sûr, d'ailleurs, que les champignons ne sont pas supposés être aussi massifs.
Kaden est également persuadé qu'Anula devait être une jolie ville, à l'époque. Enfin, la moitié qui s'est cachée derrière des hauts murs et des gardes l'est sans doute aussi, mais il n'y a jamais trouvé beaucoup d'attrait, tant elle tend à le mettre mal à l'aise. Il avait, après tout, vécu la majorité de sa vie dans les tunnels et rues les plus sombres et étroites, dans l'incertitude du soir à venir, la crainte des détonations et le silence interdit de ceux qui n'ont plus grand chose à perdre. Dans la laideur, en somme, la plus sincère. Alors l'éclat propre des bâtiments tenus impeccablement le dérangeait intimement, peu importe à quel point il tentait de se forcer ; le noeud dans ses tripes revenait toujours avec plus de force. Aussi superficiel qu'il pouvait être avec son apparence, quelque chose en lui ne pouvait pas s'empêchait de gratter le vernis éclatant dès qu'il le remarquait ; un comportement qui n'était probablement pas étranger à la méfiance absolue en tout que son père avait instillé en lui dès son plus jeune âge. L'autre moitié, ironiquement, était donc plus à son goût : elle était laide, dangereuse et traître, mais il savait à quoi s'attendre, et c'était bien plus plaisant à son esprit que le contraire. Kaden lui, aime savoir. Il aime comprendre, voir, donner du sens. Il en a besoin, même, comme une faim irrépressible qui l'avait toujours motivé à relever ses genoux abîmés à chaque chute quand il apprenait encore à escalader et se mouvoir entre les bâtiments. Il a toujours eu le besoin de relever le tapis derrière lequel se cache ce qu'il y a de plus sale, car il pense, somme toute avec une arrogance démesurée, qu'il sera le seul apte à juger de ce qu'il verra. Que tout savoir, tout comprendre, est à sa portée.

Dans un souffle de soulagement, le jeune adolescent se permet de ralentir légèrement le pas. Il se renfonce entre les rues, rajustant son masque de renard une nouvelle fois, passant une main brève sur le Goupilou accroché à son épaule sans un bruit.



La sucette craque dans sa bouche. La frustration lui fait serrer les doigts de sa main droite sur son avant bras croisé, son regard se durcissant à nouveau alors qu'il jette un coup d’œil à l'extérieur. Il espérait quelque chose, mais les données dont il avait entendu parler sont inutiles, et, au mieux, encore plus énervantes. Mais, sans dire quoi que ce soit, il ravale sa frustration. Il n'aime pas se montrer plus que ça, dans les réussites comme dans les échecs. Axel est silencieux, calme, comme une eau tranquille qui s'écrase avec régularité contre les rochers, encore et encore, jusqu'à ce que la vague soit devenue assez grande pour les engloutir. Discipliné et méthodique, il a appris à attendre, à regarder et à prendre son temps pour obtenir ce qu'il veut ; car, et c'est l'élément qui lui permet de continuer quand bien même cela doit bien être la centième fois en un an que ses pistes ne le mènent à rien, il est incapable d'accepter la défaite. Lorsque ses crocs s'accrochent, il ne lâche plus, peu importe à quel point on peut lui avoir dit que c'était peine perdue. Alors il se conforme aisément aux attentes, suit ses modèles et écoute attentivement, persuadé qu'ainsi, il ne sera pas laissé pour compte. Lorsque son père lui dit quelque chose, il ne pose pas plus de questions, se satisfaisant aisément de ce qu'il entend sans jamais s'embêter plus que ça. Axel est parfaitement content du monde dans lequel il vit, de l'attention et de l'affection qu'il obtient, alors il ne veut certainement pas qu'il se défasse. Au contraire, même, il ne cherche qu'à le renforcer.
Mais il sait, dans le fond, qu'il n'est pas grand chose, alors il se contente de ce qu'il peut faire.

-

Il devait l'admettre, il y avait quelque chose de drôle à ses yeux dans le fait de toujours les plumer au dernier moment. Se révéler lorsqu'il avait déjà gagné, prendre le temps d'exposer sa réussite tout en disparaissant comme une ombre juste après, montrer tout en dissimulant ; c'était bien le seul jeu qui l'amusait et dont il pouvait s'enorgueillir d'être talentueux. Il avait pris à se cacher avant même de savoir marcher, alors c'était devenu si naturel que c'en était devenu sa seconde nature. Kaden est comme une flamme, vive et voyante, mais aussi éphémère que l'éclat d'une braise, s'évanouissant dans l'air dès lors que le vent ne tourne plus en sa faveur. Son père n'avait jamais vraiment compris, trouvant plutôt ses frasques plus dangereuses qu'autre chose pour leur discrétion, mais Kaden n'avait jamais été très obéissant, après tout. Tout ce qu'il entendait avait besoin d'être remis en cause, comme si ce comportement lui offrirait quoi que ce soit ; un regard, une attention, une reconnaissance voir une fierté quelconque. Kaden ne s'est jamais satisfait de ce qu'il avait, au contraire. Aussi loin qu'il s'en rappelle, ce besoin irrépressible de secouer le monde dans lequel il vit avait été bien vite présent. Il n'est pas inquiet que les choses changent, au contraire. Il serait bien heureux de tout renverser, de tout défaire, si cela lui permettait d'être enfin satisfait.
Mais il sait, dans le fond, qu'il n'est pas grand chose, alors il se contente de ce qu'il peut faire.

--

« Et c'est là que je vous tire ma révérence ! »

Dans un soupir agacé, il finit par éteindre l'écran sur lequel se projetait encore les images envoyées par le centre de surveillance d'Anula. Rien ne pouvait être récolté, de toute façon, hormis peut-être cette sensation d'agacement profonde qui venait s'agiter dans son ventre à chaque fois que ses yeux se reposaient sur la silhouette qui se moquait avec allégresse des gardes en face de lui. Quand on lui avait dit qu'un des deux qu'il recherchait était visiblement passé par ici il y a quelques heures, il ne s'attendait pourtant pas à quelque chose de grandiose, mais... Non, peut-être juste un peu plus. L'impression persistante de chasser des ombres sans arriver à rien tenait encore en place ; et ce n'était pas les moqueries de Faust, bien narquois, qui l'adoucissaient. Lorsqu'il avait demandé à s'en charger, ne supportant de toute façon plus vraiment de rester à ne rien faire, il se doutait que ce serait extrêmement compliqué : maintenant, il avait surtout l'impression d'être le clou de la farce. À quoi bon des images floues et imprécises, aux visages voilés, de silhouettes à peine distinguables...
Ça m'arrange à quoi, de voir sa marque de chaussures, de toute faço-... ?

Ses yeux se froncèrent durant un instant alors que, mécaniquement, il ralluma rapidement l'écran du centre de contrôle pour venir poser son regard sur les bottes qu'il avait vu. En remarquant l'humidité verdâtre sur le bord de son talon, ses yeux s'écarquillèrent vivement.

« De quand est-ce qu'elles... ? »

Peut-être, en fin de compte, qu'il ne serait pas venu ici pour rien.



Peut-être, en effet, qu'il n'aurait pas dû mentir quant au fait qu'il allait « passer » dans la jungle chercher du bois et quelques vivres. Probablement qu'après le fiasco de la dernière fois, il aurait plutôt dû faire profil bas et éviter de donner une raison à son père de se méfier car ce dernier, quand bien même sa confiance était déjà bien entachée, gardait encore un peu de croyance en lui.
Ce qu'il ne sait pas ne peut pas lui faire de mal, héhé.
Lorsque l'information lui était parvenue, toutefois, il n'avait pas pu résister. C'était comme se voir agiter un gigot sous le nez, après tout. L'information avait glissé par bouche à oreille, et quand il avait appris qu'un stock de médicaments traînait dans les environs, il n'avait pas pu résister. De toute façon, il serait revenu avant que l'autre ne remarque que son absence était peut-être un peu longue, et en plus de ça, il pourrait prétendre les avoir troqué lorsqu'ils seraient arrivés vers Vanawi. Nul besoin, après tout, de s'inquiéter.
Du moins, c'était le plan jusqu'à ce qu'il ne doive quitter la partie cloisonnée de la ville à cause de son échec monumental. En plus de ne pas avoir trouvé ce qu'il cherchait, il avait été remarqué ; comble de la honte, il avait même manqué d'être rattrapé avant de réussir à s'en sortir, en partie par chance. Malgré la désagréable sensation d'échec, toutefois, il essaya d'être positif face à son « butin » bien piteux. Des trucs aux noms imprononçables et qu'il avait juste saisi comme une monnaie d'échange ne l'avançaient pas des masses.
Bon, je suppose qu'avec un peu de troc...
Même lui n'y croyait pas vraiment. D'accord, peut-être qu'il en tirerait des stocks de nourriture, mais à ce moment-là, il faudrait justifier leur provenance auprès de son père, et...

« Mais merde ! »

Il jure, ne pouvant pas s'empêcher de taper dans un caillou, qui s'en va se claquer contre un mur, venant vaguement résonner dans l'impasse assombrie. Frustré, il passa mécaniquement une main dans ses cheveux, cherchant une solution à son problème sans pour autant parvenir à son but. Un grondement rauque et grincheux lui fit vaguement relever la tête, mais il roula ensuite des yeux avec une prétention à peine dissimulée, agacé comme tout. Red, sur son épaule, se contentait de le fixer avec une lueur d'inquiétude dans le regard.

« Oui oui, Aslan, c'est bon, je sais, il faut qu'on bouge, pas la peine de râler. »

Son Némélios, aussi raisonnable qu'il soit, ne faisait que mettre du sel dans la plaie à ses yeux. Et ses chaussures pleines de boue verdâtre qui étaient plus que désagréables, d'ailleurs, n'arrangeaient rien à la situation : il avait déjà été bien chanceux que le vieux système d'évacuation des eaux de la rivière soit encore fonctionnelle, même si il ne marchait que par cycles de plusieurs heures. Il avait eu l'occasion de s'inquiéter durant l'attente, mais maintenant qu'il en était à l'autre bout, il était déjà plus tranquille. Il avait juste besoin d'une pause pour calmer ses nerfs et jouer à l'innocence devant son père. Même si Kaden se savait très doué en tant qu'acteur, il n'empêchait que son paternel avait l’œil fin pour remarquer ce genre de choses, tant et si bien qu'il était déjà surpris qu'il l'ait laissé partir. Répéter son speech dans sa tête serait donc efficace, ou du moins, il l'espérait un petit peu. Un autre grognement, plus fort cette fois, lui fit froncer les sourcils avec déplaisir, son expression se faisant cette fois sévère.

« Aslan, ça suff- »

Et, juste à côté de lui, le mur partit en morceaux.



Enfant, il n'avait jamais vraiment compris pourquoi. Il avait, bien entendu, posé des tonnes de question, ne saisissant pas la raison de cette soudaine absence, encore une, après ces trois années de relative stabilité. Du moins, dans sa tête. Il était bien heureux d'ignorer les rapports auxquels il aurait pourtant pu accéder si il le désirait, ou de chercher la raison de l'expression interdite de Mikael dès lors que le sujet venait sur la table. Tout ça lui importait très peu. Enfant, tout ce qui l'intéressait était de comprendre pourquoi son père n'était plus là : maintenant, il ne cherchait plus. Il avait sa réponse : à cause de lui.

« Fin de partie, le mioche. »

Les mains dans les poches, il fait signe à son Rexilius de ranger ses crocs, le regard rivé sur la silhouette visiblement surprise qui se trouve juste en face. Il ne peut pas voir son visage, et il n'a rien dit, mais cela lui importe peu. Son attention est entièrement focalisée sur le garçon qu'il n'avait jusque lors jamais eu l'occasion d'approcher, même à plusieurs mètres de distance, mais qu'il chasse pourtant avec insistance depuis un an. Il lui semble pourtant tellement banal ; et il doit l'être. Ce n'est, dans le fond, qu'un quelconque adolescent de quinze ans, un rat des rues comme il en existe beaucoup dans ce monde. Quelqu'un sur qui il ne poserait pas même un regard en temps normal et qu'il aurait vite fait d'écraser sous sa botte si il s'agissait d'un inconnu, ou du moins, de ce qu'il s'en dit. Qu'on ait souligné qu'il se débrouille relativement bien l'importait peu. Si les choses avaient été différentes, il ne l'aurait jamais considéré plus d'une seconde, mais il ne peut pas faire comme si, pour la simple et bonne raison qu'aux yeux d'Axel, une bonne partie de ce qu'il considère comme inacceptable dans sa vie est indue à ce marmot.
C'était la seule chose qu'il avait pu trouver comme acceptable. Comme à peu près tolérable dans sa conception de la réalité. Que c'était de sa faute, à ce môme né dehors, si son second père s'était évaporé dans la nature durant toutes ces années : parce qu'il fallait s'occuper de lui, et qu'on lui avait raconté n'importe quoi, voilà tout.
Alors, en le voyant ainsi surpris et visiblement peu à l'aise, Axel ne peut pas dire qu'il n'est pas un tout petit peu satisfait.



« Ah, si c'est pour le fanclub, c'est pas l'heure des autographes, désolé. »

Malgré son ton narquois et faussement avenant, sa main s'est tout de même portée vers sa ceinture de pokéballs, peu rassuré devant la vision du monstre préhistorique qui se tient à côté de l'inconnu venu l'approcher. Il n'est certes pas du genre à être très impressionné par les démonstrations de gros muscles, mais les grognements mauvais de la bestiole ne le rassurent pas plus que ça. Aussi flambeur qu'il soit, en outre, il est relativement capable de comprendre quand est-ce que le moment de fuir se fait sentir. Le Némélios à ses côtes gronde déjà, battant de la queue pour signifier son mécontentement, l'éclat de ses crocs brillant comme une menace implicite. Sur son épaule, son Goupilou s'est crispé, sifflant plus discrètement.

« T'as bien rigolé, mais maintenant, on arrête de jouer. »

Le grondement d'une autre bête féline le surprend, le faisant sursauter alors que son regard se porte vers la Némélios à quelques mètres de lui, s'approchant à pas de chat d'eux. Derrière lui, son propre lion de feu grogne encore davantage.

« Dans ce cas, il ne faut pas rendre ça aussi drôle, de vous plumer. Blue ! »

L'ombre de sa Galopa de Galar se dessine à côté de lui, claquant des sabots sur la terre, s'ébrouant avant de poser sur leurs adversaires un regard aussi hautain que méfiant. En face, le jeune adulte ne montre aucun signe d'une quelconque perte de confiance, esquissant plutôt un rictus amusé et moqueur, comme si tout ça le faisait plutôt bien rire et qu'il pouvait se permettre de garder ses mains dans les poches comme si de rien n'était.

« Boarf, pourquoi pas... Rex, Piège de Roc. »

Et à ce moment-là, Kaden comprit qu'il avait peut-être mordu dans plus gros que ce qu'il pouvait gérer.



Les pics de roche sortent de la terre avec fracas, faisant trembler le sol avec force et tonitruance, le son de la pierre s'éclatant parvenant à ses oreilles sans qu'il ne s'en émerveille pourtant. Elles s'élèvent dans la hauteur, comme une couronne d'épines pointant vers le ciel, aussi effilées que de véritables lames. Axel ne s'en émeut pas plus, esquissant un pas vers l'avant, ses bottes écrasant la poussière que ses propres attaques ont soulevé. Le regard plus dur et ferme, la voix se faisant presque sèche et autoritaire, il porte sur l'adolescent une expression sévère.

« Désolé, mais tu rentres à la maison. »



De quoi est-ce qu'il parle... ? Oh, peu importe, il faut surtout que je me tire de là !
Un regard en coin, et déjà, sa Galopa se hausse sur ses deux pattes arrières, sa corne se faisant brillante et bombée de lumière. Blue écrase ses sabots sur le sol, le craquelant immédiatement, tandis qu'une brusque et puissante vague d'énergie rosée se dirige avec précipitation vers le Rexilius et son dresseur. Le dinosaure est rapide, toutefois, saisissant le jeune adulte par son col avec les crocs pour esquiver avec plus de rapidité que Kaden n'aurait pu le croire. Surpris, l'adolescent ouvre de grands yeux.
W-wow, euh... Il est rapide ?!

Le sol se soulève : du moins, c'est l'impression qu'il en a pendant une seconde. La terre craquelée s'élève en d'épaisses et lourdes roches brillantes qui s'élancent rapidement vers la Galopa. L'attaque est trop proche, trop vive, trop rapide : elle s'abat avec force contre l'équidée qui ne peut que serrer les dents, reculant malgré elle tant la puissance la fait tressailler. Le dinosaure, en face, semble en outre se rengorger, ses grognements se faisant plus rauques encore. Derrière eux, Aslan rugit avec tant de force que son Mégaphone s'en va rencontrer avec fracas le Vibroscur de la Némélios, implosant comme une vague d'énergie violacée alors qu'elle n'est qu'à un mètre de son compagnon. Un nuage d'ombre et de poussière recouvre l'arrière de l'arène improvisée, tant et si bien que durant une seconde, la panique s'en vient agiter la poitrine de l'adolescent, sa voix se stressant sous le coup de l'inquiétude.

« Aslan ! »



Durant une seconde, il sent ses muscles se détendre. Il avait vraiment craint de ne pas être à la hauteur, mais son entraînement de ces dix dernières années avait bien fini par payer ; son dernier match aurait dû le rassurer là-dessus, mais il avait eu le besoin de voir par ses propres yeux.

« Regarde en face de toi. Midona, tiens-le en joug ! »

Sa Némélios se contenta de rugir d'accord avant de saisir son adversaire à la nuque par le biais d'une féroce attaque Mâchouille, usant d'élan pour ensuite envoyer ce dernier plus loin pour l'éloigner de son dresseur, se postant devant avec un rictus moqueur.
Axel ne se réjouit pas pour autant. Son regard reste rivé sur l'adolescent à quelques mètres de lui, qui n'a pas encore dit un mot depuis. Le jeune adulte ne peut toutefois que se sentir frustré par la présence du masque du cadet, ce dernier protégeant entièrement son expression et l’entièreté de ce qu'il peut ressentir à l'heure actuelle. Il n'obtient pas ce qu'il veut, et cela l'agace. Il aurait aimé une réaction, quelque chose, un élément autre qu'une vague désinvolture factice et un léger moment d'inquiétude, mais non. Son adversaire du jour s'est fait silencieux, comme si il considérait la situation. Un comportement qui, ne serait-ce qu'inconsciemment, lui est familier, le faisant se crisper encore davantage.

« Blue, Vibra Soin. Suis-moi ça par Estocorne. »

Même sa voix s'est faite calme. Axel grince des dents, ses sourcils se fronçant et ses doigts se serrant naturellement. Il ne sait pas pourquoi il est si impulsif et réactif à l'heure actuelle, habitué au fait d'être bien plus maîtrisé en temps normal, mais la présence du gamin en face de lui le met dans tous ses états. Arrogamment, il chasse toute pensée qui lui indiquerait qu'il n'est peut-être pas parfaitement maître de lui-même et qu'il devrait sans doute prendre ses distances.
Hors de question. Je n'ai pas attendu tout ce temps pour rentrer bredouille.

« Comme si j'allais attendre... Rex, Giga Impact ! »

Rexilius hurle, son cri rauque et furieux résonnant entre les murs en ruines de la ville abandonnée. En face, Galopa est immobile, un cercle de lumière brillant et apaisant l'entourant pour soulager ses plaies ; la clarté s'en va même jusqu'au Némélios, qui, comme soudainement rechargé, bombe la poitrine avant d'esquiver l'attaque Coupd'Boule de son adversaire avec aisance. Et tandis que sa corne se met à s'illuminer de nouveau, s'étendant comme pour prendre la forme d'une lance d'acier acérée, Rexilius fonce, le poids de son corps lourd secouant la terre à chaque pas rapide qu'il exécute. Pendant un instant, Kaden croit que Blue aura le temps de toucher : mais alors qu'elle relevait enfin la tête pour s'apprêter à frapper, l'énergie autour du dinosaure se fait bien plus intense, et ce dernier fonce comme une furie vers son opposant. L'attaque est puissante, débilitante, brutale, tellement que le cri de douleur que l’équidé pousse alors qu'elle est violemment envoyée contre les rochers plus loin fait se tendre de tout son corps l'adolescent. Rexilius, lui, ne bouge pas, la respiration lente et forte après avoir usé d'une attaque si intense. Si la Galopa tente de se relever, elle tremble des jambes, le bas de son corps peinant à se relever. Pendant une seconde, Axel se permet un rictus satisfait, désormais sûr de sa victoire.

« Red, Baston ! »

Ses yeux s'ouvrent d'un coup devant l'interpellation inattendue du plus jeune. Entre les rocs, pourtant, le Goupilou qui se trouvait jusqu'alors sur les épaules de ce dernier s'est faufilé comme une ombre, courant comme un éclair entre les points d'ombre pour se dissimuler jusqu'au bon moment. Une aura noire et poisseuse, parsemée d'éclats de lumière violacée, s'est mis à entourer son petit corps, se nourrissant de celles, plus faibles, de la Galopa et du Némélios plus loin. Comme imbibé de leur force, il accélère tel une véritable fusée : usant de la hauteur d'une roche pour sauter, il bondit rapidement, effectuant un piqué pour descendre vers le Rexilius comme une torpille furieuse. Le dinosaure, sur le moment, n'arrive qu'à lever la tête.

« Rex ! »

Rien à faire : Giga Impact l'a immobilisé, et il ne peut que subir de plein fouet la comète d'ombre orangée qui s'écrase sur lui avec une telle force que sa gueule s'écrase au sol sur le moment. Éberlué, Axel ne réagit pas sur le moment. Au delà de sa stupeur, cela fait un moment qu'il n'a pas été mis dans une difficulté pareille.
Je l'ai... Sous-estimé... ? … Non, non. C'est juste un sale gosse. Hors de question qu'il me vole ça aussi.
Un comportement qui, en plus de ça, rappelle à son esprit quelque chose qui lui avait été dit fut un temps par Faust, sans qu'il n'en pense grand chose sur le moment. Quelque chose sur quelqu'un d'autre, qu'il aimerait pourtant tellement distinguer du gamin en face de lui.
… Même si il manque cruellement de force, il compense par une capacité assez exceptionnelle à se sortir du pétrin par les moyens les plus fourbes et à retourner la situation à son avantage.
La pensée l'énerve encore plus. Ses sourcils se froncent sous le coup du déplaisir. Sa main se porte vers la poche gauche de son pantalon : il a, après tout, plus d'un as dans son sac.



Kaden se permet de souffler. Durant un instant, il avait été pris par surprise, mais plus maintenant. Il admettrait, peut-être, qu'il avait tendance à largement sous-estimer ses adversaires jusqu'à ce que ces derniers ne le mettent dans une situation difficile. Mais plus maintenant, du moins, et pas ici. Même si la force de son opposant l'avait brièvement déconcerté, la panique a entièrement disparue, remplacée par un calme et une détermination froide.

« Hé, c'est pas très juste, le trois contre deux ! 
- J'en ai rien à faire, de ce qui est juste. Tricherie !
- Midona ! »

Une nouvelle fois, le Goupilou se charge d'ombre, sa gueule laissant entrevoir un rictus mauvais, des caquètements aigus sortant de sa gorge alors que la force physique de son opposant vient gonfler la sienne. Tout près, la Némélios échappe de peu au Bélier qui se précipitait vers elle, sautant entre les roches pour venir se dresser devant le Rexilius. C'est lorsque l'attaque se mue en une explosion de violet et de rouge qu'elle la subit de plein fouet. La lionne est projetée vers l'arrière, roulant le long du sol jusqu'à l'arrière de son dresseur. Rexilius grogne, couvrant le juron d'Axel qui, de plus en plus énervé, serre les dents. Si il jette à son opposant un regard incendiaire, ce dernier semble peu intéressé et bien plus intrigué par les cieux, fixant les hauteurs avec insistance.

« De toute façon.. J'ai d'autres rendez-vous plus importants, désolé ! »

Kaden se permet d'esquisser un sourire orgueilleux sous son masque. Il a assez d'intelligence, toutefois, pour se rendre compte qu'il vaut mieux pour lui de déguerpir : si il a été repéré, il a de toute façon peu de temps pour s'enfuir. De toute façon, la figure ailée qu'il voit se rapprocher de plus en plus n'est pas bien proche : et si il soupire de soulagement en la remarquant, cela ne dure pas.
D'un seul coup, un éclair gris perce l'air, s'emparant du Bruyverne qui s'approchait par la gorge, avant de l'envoyer violemment vers le sol, des éclats de glace s'éparpillant derrière les traces de sa morsure pour venir se fracasser à terre en même temps que sa victime.



« Attends, tu croyais tout de même pas que j'avais pas prévu ça ? »

Il glousse. Il ne croyait pas avoir besoin d'en arriver là, certes. Il avait prévu de terminer ça rapidement, ou au pire de le laisser partir après l'avoir testé un peu afin de faire le point : mais c'est devenu plus personnel depuis un moment déjà, et ses plans, de toute façon, ne tiennent plus. Il n'oublie pas qu'il a juré de ne pas lui faire de mal, mais il estime qu'après tout, on ne lui avait jamais rien dit quand au fait de lui faire faire une petite sieste.

« Ridley, lâche-moi ça, c'est pas l'heure du repas. »

Le Méga-Ptéra gronde d'énervement, son regard se faisant torve alors qu'il le relève vers son dresseur, avant qu'il ne concède finalement à relâcher sa proie bien mal en point. Lâchant le dragon hors de sa gueule, il laisse pourtant entrevoir l'ivoire de ses crocs aiguisés, toisant l'adolescent et ses trois pokémon avec un mépris évident. Machinalement, Axel joue avec le brassard contre sa jambe gauche, d'où brille avec plus d'insistance la méga-gemme qu'il y accroché depuis que le Ptéra s'est rapproché.
Je n'aurais pas cru avoir besoin de Ridley, mais... Il faut ce qu'il faut.

« T'es pas mauvais, mais t'as cinq ans de retard pour me battre. Jet-Pierres. »

Les roches se relèvent à nouveau, comme des météores surpuissants, s'écrasant contre le Némélios, le Goupilou et la Galopa en un instant, sans même que l'adolescent eut le temps de réagir. Les deux pokémon trébuchent vers l'arrière, sonnés sur le coup, lui faisant pousser un hoquet horrifié. Blue était déjà considérablement épuisée, et Aslan, fatigué par son propre match, n'arrive plus à se relever. Red, trop fragile, ne pouvait pas plus supporter qu'une seule attaque.

« Ultrason. »

Le son lui vrille les tympans : si violemment que son premier réflexe est de porter ses mains à les oreilles pour les protéger, une grimace s'étirant sur son visage. Kaden, dans un instant d'inattention, ferme les yeux. Un instant suffisant pour que le plus âgé saisisse son poignet au vol, avant de le faire trébucher au sol.

« … Mais il t'a bien entraîné, j'vais pas le nier. »

Il ne cache pas l'acidité de sa voix, quand bien même elle suinte la jalousie et la rancune. Bloquant les jambes de son opposant, sa main se porte immédiatement vers le masque du plus jeune qu'il lui arrache sans plus d'attente. Et, là, en un instant, sa respiration se coupe.



Il était près à lui coller la droite du siècle. Quand bien même ses pokémon étaient hors de combat, il n'était pas du genre à abandonner, même dans une situation désespérée. Il ne s'attendait pas, toutefois, à ce que l'attention de l'aîné soit principalement portée vers son masque, et sûrement pas à le voir s'immobiliser instantanément une fois que celui-ci fut retiré. Les yeux écarquillés, le jeune adulte le fixe sans un mot, aussi blanc que si il venait de voir un fantôme. Ses muscles se sont entièrement crispés, son bras s'est arrêté. Quelques secondes d'hésitations qui sont suffisantes au plus jeune pour, cette fois, effectivement venir faire rencontrer son poing avec la joue de son adversaire.

Le plus âgé roule une fois sur le côté, tenant fermement la zone endolorie dans sa main alors qu'il grince des dents. Kaden, de son côté, se relève avec précipitation, fixant l'autre avec une expression mêlant à la fois crainte et incertitude, se dépêchant de rajuster son masque en sachant bien, toutefois, que c'est trop tard.
Mais qu'est-ce qu'il a... ? Il voulait me tuer, non ?!

Pas un mot, toutefois, ne sort du brun aux cheveux hérissés. Ce dernier le fixe en silence, le regard plus calme mais pas moins déterminé, le dévisageant avec une telle insistance que le malaise que Kaden sentait déjà en lui ne fit que se raffermir. Il ne bouge pas. Quelque chose semble le déranger. Le regard de l'adolescent, toutefois, se pose sur autre chose : un éclair de bleu et de noir qui saute entre les roches délimitant le territoire et qui, bien vite, se rapproche d'eux. En le reconnaissant, le jeune garçon ne peut pas retenir un hoquet de surprise.

« Hayato ?!
- Haya-... ? »

Le plus âgé ouvré de grands yeux, à nouveau paralysé alors que le Luxray borgne vient se dresser droit devant Kaden, grognant d'une voix mauvaise et dure. Son regard d'or perçant ne quitte pas le jeune adulte, des étincelles venant craqueler sous ses pattes comme un avertissement supplémentaire. Axel, pourtant, ne vient pas porter sa main à sa ceinture de balls, comme il pourrait le faire. Confus, Kaden ne prend toutefois pas le temps de l'interroger ; sur l'instant, il est plus interrogé par la raison de la présence du lion de foudre, mais une hypothèse se présente bien vite à ses neurones.
Est-ce... Est-ce que Papa se doutait que... ?!

Pas le temps, toutefois, de traîner. Rappelant ses compagnons tombés, l'adolescent se précipite vers son Bruyverne, lui secouant une épaule pour lui faire signe de se relever au plus vite.

« M-Médeus ! Allez, on se dépêche ! »

Le dragon, lentement, se hisse sur lui-même. Axel, lui, n'a toujours pas bougé, les yeux rivés sur le Luxray qui le menace, la tête ailleurs, bien loin de tout ça.



Hayato... Tu me reconnais, dis... ?
Il ne parle pas. Il n'a pas envie de le faire, car chaque grognement supplémentaire vient resserrer le nœud dans sa poitrine. La question est aux bords de ses lèvres, mais il ne la prononce pas, son regard brun voilé d'une nostalgie qui vient piquer sa poitrine d'un venin douloureux. Le Luxray continue de le fixer comme si il était un ennemi, l'air mauvais et agressif. Si Axel l'avait déjà vu se comporter ainsi contre son père, jamais le lion ne l'avait considéré ainsi auparavant ; et en y pensant, sa gorge se noua encore davantage.
Je ne suis pas... Je ne suis pas juste un étranger, n-non... ? Je suis toujours....
Les battements d'aile du Bruyverne le réveillent tout juste, le faisant sursauter sur place alors que l'adolescent, pressé, se met à décoller, serrant avec force son Goupilou assommé dans ses bras. Lorsqu'Axel relève finalement le regard, le dragon a déjà pris de la vitesse, et c'est son Ptéra qui se met à crier, indigné, comme pour lui faire signe de réagir lorsque le Luxray les suit à la manière d'une ombre, s'enfuyant sans plus attendre. Il ne bouge pas, toutefois. Son talkie-walkie, après quelques secondes, se met à crépiter, la voix paniquée d'un milicien résonnant à ses oreilles sans que le bruit ne sorte toutefois le sortir entièrement de sa transe.

« … M-monsieur, est-ce qu'on... ?!
- Non. Non, laissez-le. »

Sa voix est plate, morne. Sa gorge s'est serrée. Le poids dans sa poitrine prend maintenant tellement de place qu'il lui fait l'effet d'un uppercut, tant et si bien qu'il ne peut que ravaler sa salive en observant la silhouette ailée disparaître dans les airs. Derrière lui, Rex et Midona se relèvent avec difficulté en lui jetant des regards hésitants. Ridley, à côté, grogne son mécontentement, beuglant avec férocité contre son dresseur qui ne lui répond pas, la main crispée autour de l'appareil électronique. Une seconde après, il finit par l'envoyer brutalement au sol, avant de serrer ses poings jusqu'à ce que les jointures n'en deviennent blanches.
C'est pas fini.
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Segnif

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MessageSujet: Re: Echoes    Echoes  Icon_minitimeVen 7 Fév - 0:39


« Bah alors, p'tit chat, ça s'est pas passé comme prévu ? »

Ses muscles se tendent alors qu'il ferme la porte derrière lui, restant immobile durant un instant. Son visage, toutefois, s'est entièrement renfermé, ses traits crispés en une expression taciturne tandis que son regard marron, mauvais comme tout, se pose sur celui qui l'a interpellé. De tous ceux qu'il n'avait certainement pas envie de voir maintenant, Faust était tout en haut du panier. Il avait espéré filé jusqu'à sa chambre sans avoir à croiser qui que ce soit, mais la chance n'était pas de son côté. Se retrouver à pleurnicher dans les bras de son père comme un enfant en crise devait faire partie des choses qu'il détestait le plus, mais après des mois d'efforts, se retrouver le nez devant un échec cuisant était encore plus pénible. Les yeux encore rouges, il trouva néanmoins sans souci l'énergie d'être aussi mordant qu'incisif.

« La ferme, le clebs. »

Il siffle comme un serpent prêt à mordre. Il n'est pas aussi brusque, d'ordinaire. Il est même loin de l'être, la plupart du temps très calme et maîtrisé, souriant avec fausseté comme si il s'agissait de la chose la plus simple du monde et capable de rester imperturbable même devant les situations les plus défavorables. Tout au plus, un sarcasme à peine voilé vient casser l'image : mais depuis quelques mois, toutefois, ce vernis impeccable se froisse de plus en plus. Sa patience également, surtout à l'égard d'un énergumène qu'il ne supporte déjà pas de voir en temps normal, mais pour qui il contient d'ordinaire son mépris.

« Si j'avais demandé l'avis du roi des ratés, je serais venu toquer à ton bureau directement. 
- Eh bah... Quel langage. »

Le conseiller ténèbres tente de dissimuler son agacement derrière un faux sourire désinvolte et un ton amusé. Malgré ça, sa frustration transparaît rien que dans la crispation de ses muscles et les lueurs d'énervement dans le creux de son regard bleu.

« C'est pas comme si on t'avait pas prévenu. Tu cherches deux rats dans un égout, tu vas galérer à les trouver dans leur domaine.
- Je t'ai pas demandé ton avis, que je sache. »

Faust l'insupporte. Avec ou sans cheveux grisonnants. Il l'a toujours insupporté, pour tout dire : enfant, il lui faisait les pires crasses sans jamais ressentir de grand remord, même si il marmonnait des excuses pour la forme et pour qu'on lui lâche les pieds à la fin. Que ce soit les affaires disparues, les saletés éparpillées ou les pires farces faites sans la moindre bienveillance, il avait toujours redoublé d'inventivité pour lui pourrir la vie, et pour cause. Il n'a certainement pas oublié le comportement de ce dernier envers celui qu'il estime toujours comme étant son second père lorsqu'il était enfant, ou le simple fait que Faust l'ait laissé de côté dès son plus jeune âge. Alors l'entendre venir le narguer quand il est déjà on ne peut plus énervé est plus ou moins la goutte d'eau qui fait déborder le vase, tant et si bien qu'il adresse maintenant à son interlocuteur un sourire aussi sucré que sa voix est devenue mielleuse.

« Sauf si tu as des nouvelles de ta fille ? Ou elle refuse toujours de t'adresser la parole et travaille activement avec les anarchistes ? »

Il eut du mal à cacher l'inclinaison satisfaite de ses lèvres en voyant le conseiller se tendre et son expression s'assombrir. Axel se fiche bien de cette histoire, n'ayant jamais connu Alice et ne s'intéressant pas du tout à ce qui sort de son entourage proche, alors cela ne dérange nullement d'utiliser ce qu'il sait douloureux pour gagner une joute verbale. Son rictus se fit plus narquois encore alors qu'il avançait de quelques pas dans le couloir, le regard marqué par des éclats d'arrogance à peine dissimulés.

« Tu m'excuseras, après quinze ans passé à chercher des gens, j'aurais cru que tu ne seras pas un incapable. »

Axel glousse sans grande honte, on ne peut plus amusé par l'énervement qu'il sent monter dans les veines de son interlocuteur et qui, en plus de ça, ne peut pas faire grand chose. Méphisto peut plus ou moins faire ce qu'il veut quand il veut – sauf avec lui, et ça, le jeune adulte ne se prive pas de le lui rappeler, même indirectement. Passant à côté de ce dernier comme un chat devant la tasse qu'il vient de renverser sous les yeux de tout le monde, il reprend la parole avec une voix plus plate, cette fois, l'expression neutre et désintéressée.

« La seule raison qui fait que papa t'as pas viré, c'est que tu restes gentiment à la niche sans faire de bulles. »

Il est plus sec, cette fois. Toute cette histoire n'est qu'un prétexte, bien sûr, une excuse à peine voilée pour cracher une nouvelle fois sa détestation évidente du plus âgé. Ils sont assez rares, ceux qui horripilent vraiment Axel : la plupart du temps, il s'en fiche, tout simplement. Faust, toutefois, est autre chose. C'est plus personnel. Le fait qu'il l'ait toujours jugé entièrement responsable de leur incapacité à trouver des traces des absents n'aidait certainement pas son cas.
En face de lui, le conseiller s'est rattrapé, dissimulant sa frustration derrière un lever d'yeux au ciel insolent : il en a, après tout, vu bien d'autres. Même si son ego est piqué, il arrive tout de même à retomber sur ses pattes, bien peu impressionné par ce chat qui feule devant lui.

« Tu fais bien le malin, pour quelqu'un qui vient de se foirer magistralement. Maintenant, ils savent que tu les cherches, bravo : tu viens de te mettre toi-même dans la mouise. Tes chances sont passées de quelques pourcentages à un zéro pointé. »

Pour peu, cela pourrait presque figure de conseil, avec son ton las et dénué de toute trace de colère. La plaie, toutefois, est encore imbibée de sel, tant bien qu'Axel, le prenant à cœur, ne lui jette qu'un regard incisif, on ne peut plus vexé.

« Je l'avais.
- Bah, il est où, alors, champion ?
- Je le l'ai laissé partir, ce n'était pas le bon moment. »

Pirouette de rattrapage on ne peut plus maîtrisée : mentir et faire comme si était aussi simple que de respirer, à ses yeux. Il s'impressionnerait presque lui-même de son calme et de sa tranquillité, parvenant à mettre sous table sa frustration grandissante dans le simple but de ne pas avoir l'air de se dégonfler. Ou, et ce serait bien plus grave, de laisser entendre que peut-être, juste peut-être, qu'il s'était ramolli. Que sa prise s'était déserrée, que sa poitrine s'était faite trop lourde, que ses pensées étaient devenues confuses, qu'il avait laissé ses émotions prendre entièrement le contrôle et qu'il avait perdu le fil bien trop vite. Qu'il s'était montré impulsif, bêtement rapide, lent... Tout un tas d'erreurs on ne peut plus ridicules pour quelqu'un comme lui, du moins, à ses yeux. Il y repense avec un nœud installé au fond de sa gorge, l'humiliation remontant comme une houle désagréable. Il la refoule avec violence, raffermissant sa mine pour qu'elle se fasse plus sérieuse.

« Mais je ne me laisserais pas attendrir une seconde fois. »

Il repense, durant une seconde, à son hésitation. Lorsqu'il avait démasqué l'adolescent et vu le visage d'un fantôme à sa place, lorsque la silhouette du Luxray s'était clairement opposée à lui, lorsqu'il aurait pu l'attaquer par derrière... Faust, de son côté, ne dit rien, le fixant en silence, le regard rivé sur lui, comme si il pensait à quelque chose. Quand il reprend la parole, toutefois, c'est avec un air désabusé et acide.

« Ouais, ton père disait pareil. »

Le quasi cinquantenaire n'est même pas dans l'offensive, plus blasé qu'autre chose et fatigué par tout ça. Axel, pourtant, se tend d'un coup net, fronçant les sourcils et portant vers l'aîné une mine sombre et grave, comme si il le défiait du regard de dire quelque chose de plus. En esquissant trois pas vifs vers lui, il grogne presque, sa voix claquant entre les murs comme une invective acerbe.

« T'as quelque chose à dire, tonton ? »

En face, Faust ne cille pas, continuant de le fixer avec la même fermeté désabusée, quand bien même le mépris implicite dans la voix d'Axel s'est fait encore plus évident. Les sourcils froncés, il répond presque du tac au tac.

« Je dis juste qu'à force de chasser des ombres, faudra pas vous étonner que la maison vous tombe au coin de la gueule. »

Levant les yeux au ciel, il finit toutefois par se tourner sur le coté, prenant la direction de son bureau avec un pas qui se trouve malgré tout être plus rapide. Il ne laisse au cadet qu'un dernier regard, les épaules levées et tendues, la voix plus sèche.

« Maintenant, j'ai des choses plus importantes à faire, comme, tu sais, du travail. »

La porte de son bureau claque derrière lui, et Axel ne vient pas la chercher, se contentant de fixer l'endroit où il a disparu d'un air mauvais. Dans son ventre, l'agacement s'est mué en un nœud désagréable, venant s'ajouter à l'autre, bien plus personnel et insidieux, qui se trouvait déjà là depuis quelques heures déjà. Grommelant, il claque la porte de l'escalier de service derrière lui : descendre les marches en claquant des talons ferait le plus grand bien à ses nerfs.[/color]
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