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 Flashbacks (Natsu, passé)

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MessageSujet: Flashbacks (Natsu, passé)   Flashbacks (Natsu, passé) Icon_minitimeVen 19 Juil - 0:36


FB I

Faust doit admettre que de toutes les créations qui existent en ce monde, les plantes n'étaient peut-être pas celles qui suscitaient le plus de fascination chez lui. Clive préférait les paysages, mais de son côté, l'archange de la miséricorde devait admettre avoir une appréciation plus nette des humains. Aussi rudimentaires qu'ils soient (après tout, ils ne connaissaient rien, par définition, qui ne soit pas à leur portée), ils avaient au moins le bénéfice de... Eh bien, bouger, disons. Exprimer vocalement leurs émotions et leurs pensées aussi, même si les plantes avaient leur propre langage, (« bien plus fin et subtil », comme disait l'autre). Sans grande honte, Faust peut admettre qu'il n'a pas la patience de les observer plus attentivement que quelques secondes, ou même d'apprendre leur fonctionnement distinct. Ce n'est pas son travail, en soi. C'est d'ailleurs pour ça qu'il est quelque peu admiratif de celui dont ça l'est.
Il s'avance de quelques pas, les mains croisées dans son dos, le regard se portant distraitement vers les arbres (des « cupressus ») et les buissons de houx (des « Ilex aquifolium ») soigneusement tenus. Cette clairière lui est assez charmante, en réalité, et il se surprend à esquisser un sourire de temps à autre en remarquant les petites touches de couleur ici et là, les ajouts, les dénotations, les parallélismes discrets. Les fleurs sont en éclosion, ou du moins, une bonne partie se découvre progressivement. Pour tout dire, il était quelque peu sceptique, lorsqu'ils avaient décidé de le placer à l'est de la Mésopotamie ; le territoire, aussi fertile qu'il l'était, était tout de même assez rude pour les plantes les plus fragiles. Il avait visiblement eu tort, puisqu'elles semblaient resplendissantes. Sa visite ne serait donc sûrement pas longue, mais quelque part, il en était un peu déçu ; cela consistait en une pause sympathique, lui permettant de penser à autre chose que ses responsabilités personnelles de temps à autre. Ce n'était pas très Bien, il le savait, mais il y avait quelque chose d'un peu égoïste là-dedans ; un peu comme lorsqu'il trouvait l'excuse d'un sujet « important » pour réunir ses frères et faire tout sauf ça (il se promettait de gagner le prochain concours de vol, par ailleurs). Puis, en un sens, il n'était pas le seul à le faire. Phanuel n'était pas bien discrète, lorsqu'elle s'y glissait en pensant ne pas être vue ; mais là encore, Faust tournait un œil aveugle, ne voyant pas vraiment de raison de s'en préoccuper plus que ça. Tant que le gestionnaire des lieux ne se plaignait pas, et qu'aucun ordre supplémentaire ne venait d'en haut...
Par ailleurs, en parlant de ça...

Il s'étira distraitement, s'avançant dans la clairière la plus dénudée du jardin, jusqu'à apercevoir le bourgeonnement d'un pommier en devenir. Si il posa un œil distrait dessus pendant quelques secondes, ce n'était toutefois pas cela qu'il cherchait, vu sa manière de jeter un regard circulaire aux alentours. En apparence, il n'y a que le silence, accompagné de cette très légère brise qui passe entre les feuilles et les branches. Le calme y règne, en règle générale, alors il pourrait ne pas s'en étonner, mais il sait, toutefois, qu'il est purement artificiel. Amusé et quelque peu attendri, il se permet le début d'un sourire doux, laissant ses ailes se déplier et sa grâce fourmiller chaleureusement vers l'extérieur, comme pour en appeler une autre.

« Ne crains rien, ce n'est que moi. »

Il ne reçoit au début aucune réponse. Quelque peu vexé, Faust esquisse une moue désabusée, manquant presque de lever les yeux au ciel face à cette méfiance somme toute toujours aussi intense, mais il sait qu'il ne s'agit que d'une question de temps. Aussi miséricordieux qu'il soit, toutefois, il sait aussi que sa patience n'est pas des plus étendues, alors il se permet d'esquisser deux pas en la direction d'un arbre somme toute très banal (ils se ressemblaient tous, de toute façon), pour venir en frôler les extrémités d'une main, la mine innocente, un rictus au coin des lèvres.

« … Tiens, si il n'y a personne, je peux arracher cette feuille de- »

Alors que ses doigts se refermaient contre sa cible, quelque chose vient subitement se refermer autour de son poignet, l'immobilisant instantanément. Un sourire digne d'un chat fictif qui n'avait pas encore été inventé s'étira sur le visage de l'archange majeur, encore plus maintenant que ses yeux se posaient sur le visage renfrogné et presque boudeur de son hôte. Satisfait, il n'exprima aucune excuse, se contentant de glousser avec désinvolture tandis qu'il éloignait tranquillement sa main, incitant le cadet à le libérer.

« Bonjour à toi aussi. »

Sa taquinerie est accueillie sans réponse, ce qui ne l'étonne pas plus de ça. Au lieu de cela, l'archange mineur s'incline respectueusement, dans une position de salut. La main contre la poitrine,  il se montre relativement solennel, jusque dans sa voix, qui ne s'anime d'aucune chaleur ou froideur visible.

« Mon Prince. »

Il y met même l'accentuation. Le sourire au coin du cadet, toutefois, trahit son amusement. Entre deux pouffements, Faust se permit de chahuter distraitement sa tête, un rictus amusé mais désabusé au coin des lèvres. Il fait bien attention, par ailleurs, de saisir le cou du plus petit entre ses bras pour l'empêcher de s'enfuir, quand bien même il gesticule dans ses bras. Un rictus joueur se dessine toutefois sur ses traits alors qu'il reprend la parole d'une voix faussement renfrognée, laissant néanmoins clairement transparaître son amusement.

« Idiot ! Ça t'amuse, c'est ça ?
- Tu as ri !
- Je devrais te punir, pour ça.
- Comme si tu allais le faire. »

Natsume glousse, la mine joviale, ses ailes, encore trop petites pour être plus larges que son dos, battant vivement sous le coup de sa bonne humeur. Il faut dire que ces formalités, entre eux, ont quelque chose de ridicule. Une moue boudeuse sur le visage, Faust se permit de tirer sur celle qu'il pouvait atteindre, tirant légèrement une plume au hasard, suscitant des couinements plaintif chez son cadet, suivi par un rire quasi mécanique, faisant sursauter ses épaules.

« H-hé !  Ç-ça suffit ! »

Il se débat avec une certaine force, mais sans y aller trop non plus, quand bien même ce n'était clairement pas ça qui allait heurter son camarade en armure. L'aîné ricane mesquinement, gardant tout de même un regard attentif sur lui pour ne pas faire de faux mouvement, mais se disant tout de même qu'il pouvait bien attendre quelques secondes encore pour le libérer.
Cela fait un moment qu'il n'a pas pu venir, après tout. Depuis quelques semaines, son emploi du temps s'est fait plus chargé, et ses visites au Jardin était devenues plus accessoires. Il aurait bien pu demander une permission, mais il se serait senti coupable de laisser une dose excessive de travail à ses compagnons, alors il avait attendu un instant de pause. Si il ne venait pas, il n'aurait pas de nouvelles du cadet, après tout ; puisque ce dernier n'en sortait jamais, il fallait bien venir vérifier que tout allait bien de temps à autre. Même si il ne dépendait pas de ses ordres, une part de lui ne pouvait qu'être inquiet pour le plus jeune des archanges : avec une certaine présomption, il tendait à se dire que rester aussi isolé ne devait pas être une très bonne chose, quand bien même il n'avait jamais entendu de complaintes de ce dernier. Toutefois, ces derniers temps, il tendait à se demander si il s'agissait tant de dévotion envers son assignation qu'autre chose, même si il ne lui en ferait pas part de cette manière.
Eh bien, je ne suis pas là pour rien, de toute façon.[

Déconcentré durant quelques instants, il en oublie brièvement ce qu'il était en train de faire. Tant est si bien qu'il ne peut qu'être surpris lorsqu'un arbre se mit à pousser à ses pieds : il ne l'esquiva que de justesse en se décalant d'un pas vif, libérant son vis-à-vis par la même occasion. Boudeur, il fit la moue.

« Tu triches !
- C'est toi qui m'a dit de soigner ma défense, il me semble. »

La fausse innocence du cadet lui fit rouler des yeux, retenant tout juste une expiration mêlant exaspération et amusement. Un peu blasé par la tendance de ce dernier à entendre ce qu'il voulait bien entendre, il se permit une remarque sarcastique, les sourcils haussés et le coin de sa bouche relevée en un rictus désabusé.

« Il me semblait aussi t'avoir aussi dit de venir plus souvent en entraînement, non ?
- J-j'étais occupé ! »

La piteuse défense de l'autre et de sa voix tressaillante, ainsi que ses joues rougissantes de honte, lui en dirent assez pour qu'il soupire d'un air blasé, exaspéré mais pas foncièrement énervé. En soi, Faust n'a pas vraiment envie de lui faire de remarques à ce sujet : il fait son travail avec diligence, alors il ne l'embête pas trop avec ce qui lui déplaît tout particulièrement (quand bien même il aurait bien fallu qu'il fasse des efforts là-dessus).
Comme si il y aurait jamais de raison que l'on se batte, en plus.

« Allez, cesse donc. J'aurais espéré un accueil aussi chaleureux que ceux que tu fais à Elliott, au moins. »

Il n'est pas sans savoir l'affection que porte le l'archange mineur à son frère. Il n'en avait pas été étonné, en un sens, puisque Clive l'avait déjà en affection depuis longtemps, et qu'il y avait peu de risques que le calme de ce dernier déplaise à Natsume. Il n'est pas jaloux, loin de là : il est plutôt amusé, disons, de l'enthousiasme du jardinier lorsque sa timidité ne le fait pas se cacher dans un buisson jusqu'à ce que les potentiels intrus ne soient partis. Et encore, « intrus »... Tout le monde ne rentrait pas ici, après tout. Simplement, le gardien des lieux n'aimait ni se montrer, ni parler, et Faust était quelques fois mis dans l'embarras lorsqu'il fallait expliquer que oui, le jardin était correctement gardé, mais que son protecteur était trop peureux pour oser se montrer.
Puisqu'il le connaît depuis sa naissance, toutefois (ce qui était le cas pour la plupart d'entre eux, il est vrai), et qu'il lui fait relativement confiance, le cadet ne se cache pas de la même manière en sa présence, bien qu'il puisse rester discret de temps à autre, pour certaines raisons. Il sait donc très bien pourquoi il tentait de rester isolé aujourd'hui, même si il cache cela sous une petite pique amicale. Face à cette dernière, il semble toutefois confus (ce qui n'était pas très étonnant, l'implicite lui passant souvent par dessus le nez), plissant les yeux et reprenant la parole d'une voix moins assurée, confus.

« Mais quel rapport ? »

Désarçonné par le fait d'être pris si littéralement, Faust ouvre bêtement la bouche, se massant nerveusement l'entre sourcils en hochant négativement de la tête.

« … Je plaisante, Natsume, je... »

En soupirant, il se dit qu'il valait mieux ne pas chercher plus loin, et il hocha négativement de la tête, comme pour lui signifier de laisser tomber. Mécontent, le cadet fronça les sourcils avec déplaisir, sans pour autant protester. Plus poli, toutefois, Faust reprit une mine plus agréable, parlant d'une voix tranquille alors qu'il jetait un coup d’œil aux alentours.
Tiens, elle est nouvelle, cette rivière. Il les a ajouté aussi, ces fleurs, au final... ? J'aurais cru que ces fruits-là auraient été supprimés, tiens. Enfin, en même temps, c'est comme les dahut, tant qu'on en fait peu, peut-être que ça s'éteindra par soi-même.

« Enfin bon. Excuse-moi, je ne te dérange pas... ? Je me disais que tu devais être occupé, avec, enfin... Ton projet en cours. »

Une lueur de curiosité passa dans son regard. Il en avait bien entendu parler, mais jusque là, il n'avait pas pu satisfaire son interrogation. Ou du moins, si il avait fait traîner ses oreilles ici et là, le sujet était tellement secret qu'il valait mieux ne pas en parler trop publiquement. Pour autant, il ne pouvait pas s'empêcher de le mentionner, maintenant qu'il avait la possibilité de passer par ici.
Face à sa question, le cadet ne se rabroua aucunement, ce qui ne surprit pas le plus âgé. Le visage de Natsume s'illumina instinctivement, s'arborant d'un grand sourire et d'une mine tout particulièrement joyeuse. Presque guilleret, il saisit le poignet de son interlocuteur pour le guider vers l'arrière, la voix marquée par une très nette joie.

« Non non ! Attends, je vais te le montrer ! »

Faust cligna des yeux, un peu surpris, mais finit par pouffer, amusé et attendri par son enthousiasme. En un sens, il n'était pas vraiment différent lorsqu'il lui présentait toutes les autres créatures, végétales ou non, dont il s'occupait : Faust se rappelait encore de l'excitation dont il avait fait preuve lorsqu'il leur avait montré, à lui et à Clive, les premières hortensias. Bien qu'ils n'avaient pas saisi son effervescence soudaine, ils avaient tout de même été rassurés de le voir aussi à l'aise avec sa tâche. Même si c'était un peu un secret de polichinelle (ou du moins, le genre de choses qui ne se disait pas), tous les anges n'étaient pas satisfaits de leur assignation, alors vu les difficultés du plus jeune avec les autres (qu'il n'osait jamais approcher et qu'il fuyait instinctivement)... Eh bien, c'était plus satisfaisant à voir.
Se laissant guider, ils durent tout de même faire quelques détours, passant au delà d'un petit labyrinthe de haies fleuries et de buissons qui s'écartèrent dès lors que la cadet marmonna quelques mots en hénokéen. Enjambant quelques cours d'eaux (et évitant d'écraser deux grenouilles qui passaient par là), ils arrivèrent finalement au centre d'une petite clairière, agréablement chauffée et illuminée par des rayons de soleil qui n'étaient pas cachés par le ramage des arbres. Tout au centre se trouvait un arbrisseau au tronc encore clair, dont seules quelques timides feuilles s'extirpaient hors de son branchage. Bien qu'il le fixa dès lors qu'il l'aperçut, l'archange du bien le dévisagea, y cherchant des particularités quelconques. Rien, pourtant, ne lui apparut.

Faust haussa les sourcils, s'étant attendu à quelque chose de plus, eh bien... Grandiose, il faut le dire. Après les volcans, il avait habitué à plus spectaculaire, disons. Natsume, pourtant, ne cache pas son sourire, secouant presque son poignet pour le lui désigner, gesticulant sur place comme si il ne pouvait pas s'empêcher de tenir en place.

« Tu vois ? Il pousse ! Je préfère attendre, m-mais... ! Je crois que ça va marcher ! »

Il glousse sous le coup de son excitation, plus guilleret que jamais. Faust, perplexe, se permet de reprendre la parole, confus.

« Mais il a l'air... Normal... ? »

Surpris, Natsume tourne la tête pour le fixer, clignant des yeux, et le regarde comme si il avait dit la chose la plus idiote au monde (et bon sang, il fallait qu'il arrête de faire ça en public, aussi, il avait l'air de quoi, ensuite !). Ou du moins, c'est ce que veut dire son expression parfaitement neutre de quelqu'un qui n'a pas du tout compris ce que vous venez de dire mais s'attend à ce que vous continuez à parler. Voyant toutefois que Faust ne le ferait, Natsume reprit la parole, dubitatif.

« … Bah, c'est un pommier, donc ça a l'air d'un pommier. »
- E-enfin, c'est juste que je m'attendais à, enfin... Disons, quelque chose de plus... ! »
- … Grandiose ?
- Oui, voilà ! Là, c'est... »

Il voulut dire quelque chose, mais après plusieurs secondes à gesticuler des mains pour désigner l'arbre sans rien rajouter de plus, il finit par lâcher l'affaire. L'expression du cadet se renfrogna quelque peu, juste assez pour qu'il ne le remarque, et il tourna de la tête, maugréant.

« Ce n'est pas ce qu'on m'a demandé. »

... J'ai fait une bêtise, je crois..
Gêné, l'archange majeur ne put que remarquer qu'il avait effectivement commis une erreur, puisque l'enthousiasme de son interlocuteur s'était tari tout à coup. Quelque chose, toutefois, lui fit se dire qu'il s'agissait d'autre chose qu'une simple démonstration d'ego. Les mains du cadet, dans son dos, s'étaient crispées, et ses ailes, agitées par l'allégresse plusieurs secondes avant, s'étaient immobilisées, tendues et immobiles.  L'ombre dans son regard laissait plutôt entrevoir une forme de frustration qu'il n'aurait pas mis entièrement sous le fait de sa remarque. Prudent, il ne dit toutefois rien.
Quelques secondes de silence passent. Les doigts du cadet, toutefois, triturent nerveusement sa main. Il mordille l'intérieur de sa lèvre inférieure, sa grâce agitée de petits remous inégaux. Le mutisme devait le rassurer quelque peu, puisqu'il reprit la parole après un long instant, la voix timorée et l'air hésitant, plein d'incertitude, voir d'une once de crainte.

« … Est-ce que tu sais pourquoi elle veut qu'ils soient ainsi ? »

La question le prit assez par surprise pour qu'il sente un petit sursaut se faire dans sa poitrine. Si il n'exprima rien sur son visage, toutefois, par désir de ne pas laisser transparaître sa pensée, l'interrogation de Natsume n'était clairement pas à ce quoi il s'attendait. Depuis plusieurs dizaines d'années, il s'était toujours montré obéissant et silencieux, quoique un peu taquin de temps à autre, mais toujours discret, diligent et réservé. Si quelque chose le tracassait, il ne le disait que rarement, que lorsque Clive parvenait à lui tirer les vers du nez (mais ce dernier ne voulait jamais lui en parler, en plus). Qu'il s'adresse de cette manière à lui, alors, en lui posant cette question, l'étonne. Si il n'était pas si étonné, il lui rappellerait sans doute qu'ils ne devaient en aucun cas questionner les choix célestes, mais il n'eut pas le réflexe de le reprendre ou de se méfier, trop confiant en l'obédience du cadet. Au lieu de cela, il le laissa parler, ne souhaitant pas l'effrayer alors que sa voix semblait si marquée par la timidité et la peur de faire une erreur.

« Elle m'a... Elle m'a demandé d'en faire les plus beaux, plus appétissants et les plus goûteux fruits d'entre tous. Elle voulait que quiconque les voit sente le désir de les manger. »

Il ne fit aucun commentaire, fixant toujours l'expression confuse et incertaine de son interlocuteur avec attention. Si ce dernier garde l’œil sur l'arbre, il laisse toutefois transparaître sur son visage une incertitude pleine, des lueurs d'inquiétude passant dans le creux de ses yeux. Ses ailes, instinctivement, se sont repliées sur elles-mêmes. Si Faust attend qu'il complète son propos, cela ne vient pas. Alors, comprenant que le cadet devait sans doute être bloqué (cela avait tendance à arriver, puisqu'il ne parlait déjà pas souvent), il fit mine d'être perplexe, haussant les sourcils pour se donner un air de curiosité naïve.

« Ce n'est pas dans tes cordes ? »

Peut-être était-ce un peu dur, il est vrai. On avait déjà reproché plusieurs fois à ce dernier d'éviter autant que possible les missions de groupe, alors l'idée d'être même vu comme incapable le piquait, et Faust n'était pas sans le savoir. Pour cette raison, il ne fut pas surpris de le voir tressauter un peu et se retourner vivement en sa direction, les yeux ouverts sous le coup de la surprise, protestant de vive voix.

« B-bien sûr que si ! C'est juste... Juste, pourquoi me demander de faire ceci, si c'est pour le leur interdire... ? »

L'hésitation était revenue alors qu'il parlait et que, inconsciemment, son regard dériva vers une zone annexe du jardin. Sa voix s'était affaiblie, également, petit à petit, alors qu'il le regardait. Faust, sur le moment, n'aurait pas su définir le sentiment dans le fond de sa poitrine, qui l'agitait et la comprimait tout à la fois. Dérangé par ceci, il eut le réflexe de se rabattre sur autre chose.

« Mettrais-tu en cause la parole céleste ? 
- N-non, non, jamais, je ne... Je n'aurais pas cette prétention. »

L'autre s'est tendu, clairement mal à l'aise, et regrettant sans doute d'avoir débuté cette conversation. Il avait tourné la tête, se recroquevillant légèrement sur lui-même, ses doigts jouant machinalement sur les bords de sa toge.

« Je suis juste... Curieux. »

Sa défensive sonne plus forte cette fois, mais il semble s'être fait aussi muet qu'une tombe, nerveux et soudainement très intéressé par tout ce qui n'était pas le visage de son supérieur. Puisqu'il fixait un point semblable à celui de tout à l'heure, en outre, Faust en vint à froncer les sourcils, ayant une légère suspicion quant à ce que cela pouvait être. Il se permit donc de poser sa question, supposant qu'il s'agirait un bon changement de sujet.

« … Ils sont là ? »

Il n'avait pas vraiment besoin de développer davantage, en soi, puisque l'autre comprit très vite. La mine fermée, plus distant qu'avant, Natsume hocha mécaniquement de la tête.

« Oui. Ils apprennent encore à marcher. Je crois qu'ils y arriveront dans quelques mois. »

Il énonce les faits machinalement, devenu platement neutre depuis sa dernière remarque. Faust ne lui en voudra pas : lui-même n'aurait pas pu prétendre se sentir particulièrement droit dans ses bottes, à l'heure actuelle. Si il examinait un peu plus la chose, il admettrait peut-être que le malaise du cadet avait résonné avec le sien, mais ce n'était pas une introspection à laquelle il était prêt à se mener. Alors, lâchement, il change de sujet, espérant par là s'excuser même tacitement auprès de son vis-à-vis, sans grand espoir, toutefois, qu'il comprenne (ce qui équivalait à s'excuser pour lui-même, en fait, ce qui n'était pas franchement glorieux).
En soi, toutefois, son interrogation n'est pas entièrement faussée : il était vrai qu'il était, comme la majorité des anges, très interrogé par les toutes dernières créations divines, tant pour leur apparence que pour leur niveau de conscience possible, bien qu'il soit encore très moindre pour le moment. Pour le moment, ils n'avaient pas encore reçu de consignes spécifiques à leur sujet, et un tel silence tendait à le rendre nerveux, lui qui n'aimait pas ne pas pouvoir se fixer au plus vite sur une situation. C'était une chose de leur offrir de pareilles capacités adaptatives ; c'était une autre que de laisser planer un pareil secret sur ce qui était destiné pour elleux. D'ordinaire, si la partie mineure du conseil céleste tendait à être laissée dans l'ombre sur les problèmes les plus épineux, bien qu'ils étaient toujours mis au courant avant les anges inférieurs, il n'était pas de même pour lui ou ses camarades. En outre, il devait avouer ne pas être pleinement à l'aise avec la force donnée à leur âme ; quelque chose dans sa tête ne pouvait s'empêcher de se demander pourquoi diable les cieux auraient créé des êtres semblables en tous points aux anges, si ce n'est sans leur grâce. Une idée lui venait en tête, de temps à autre, mais il la chassait instantanément, comme pour prétendre qu'elle n'existait pas.
En parlant de ça, d'ailleurs, il n'était pas le seul à avoir tendance à « disparaître ». L'aîné se retourna vers l'archange mineur, interrogatif.

« Ils ne t'ont toujours pas vu ?
- Non. Je ne veux pas qu'ils me voient, de toute façon. »

L'autre avait haussé les épaules, comme si de rien n'était. Il était vrai qu'il ne lui avait pas été demander de veiller sur eux, ou du moins, pas directement. Pour autant, Faust plissa un peu les yeux, dubitatif. Il lui semblait pourtant l'avoir vu plusieurs fois les observer, alors il devait avoir au moins un peu de curiosité, mais... Mais de ce qu'il en montrait là, on aurait pu croire tout le contraire, et il y avait fort à parier que c'était l'objectif. L'air désintéressé et distant de Natsume avait pris la place de sa nervosité de tout à l'heure, dans un tour de passe-passe somme toute assez impressionnant puisqu'il n'y arrivait pas encore il y alors quelques mois. Toutefois... Toutefois, il n'en oubliait pas l'une des raisons principales de sa visite.

« Nous ne t'avons pas vu non plus, lors du dernier conseil. »

La pique a le mérite d'être directe, puisque Natsume, surpris qu'il aborde le sujet maintenant, parut presque pâlir. Droit comme un i, si il ouvrit la bouche pour protester et sortir la première excuse qui pouvait lui venir, elle ne vint toutefois pas tout de suite, peinant à s'échapper et prenant finalement la forme de quelques balbutiements maladroits.

« J-j-j'étais occupé avec l'arbre. I-il faut que le travail soit bien fait, après tout. »

Faust roula des yeux, pas vraiment impressionné par son calamiteux talent d'acteur auquel le cadet, toutefois, semblait très attaché. Dans les faits, il s'attendait à quelque chose du genre, même si il était curieux de ce que serait l'excuse cette fois : très sincèrement, il était déçu par le manque d'imagination du plus jeune, à l'heure actuelle, mais il supposa qu'au fond, c'était peut-être aussi un peu de sa faute. Malgré tout ses essais, Natsume n'était jamais à l'aise dans ce genre de situations, et préférait toujours quitter les lieux, voir se faire le plus discret possible pour ne pas susciter trop d'attention. Hypersensible et incapable d'être à l'aise en étant entouré et fixé par plusieurs personnes dès lors qu'il parlait, les conseils se transformaient souvent en séance de torture pour lui. Pour lui éviter les remarques, et il en avait entendu, de certains, Faust le laissait donc sortir les excuses les plus ridicules qu'il souhaitait, tant qu'il faisait un effort pour que l'archange majeur puisse effectivement soutenir son mensonge. Au fond, quand il y pensait, sûrement qu'il devrait faire un effort supplémentaire pour l'aider à s'inclure, même si... Même si il n'en faisait pas le souhait. Pour l'instant, toutefois, sa préoccupation était ailleurs. Il hocha donc négativement de la tête, comme pour indiquer à l'autre qu'il n'avait pas besoin de l'entendre mentir ainsi.

« Je ne te fais pas de reproches. Je dis simplement que... Cela t'aiderait, je pense. Il y a des chances pour que quelques changements arrivent.
- Tu penses que... ? »

Interdit, le plus petit fronça les sourcils, perplexe quant à la supposition hésitante de son aîné. Plus calme et tempéré, comme si il analysait la situation, il se montrait toutefois patient dans ses explications. Les lèvres de Faust s'étaient cousues en une ligne horizontale, légèrement altérée par le début d'une grimace qui ne vient jamais, étant donné qu'il resta dans cette apparence d'inflexibilité, plus grave.

« Appelle ça une intuition si tu veux, mais j'ai l'impression que les choses vont bientôt bouger. Je n'ai pas encore reçu d'ordres, mais... »

Il marqua une pause, comme si il cherchait ses mots. Son regard, toutefois, s'était diverti vers l'endroit où son vis-à-vis lui avait indiqué la présence des humains. Il l'y laissa plusieurs longues secondes, pensif et plus tendu que d'ordinaire, avant de finalement se retourner vers son interlocuteur, un sourire amical au coin des lèvres.
Je suis sûrement inquiet pour rien.

« Tant que nous continuons à ouvrer pour le bien commun, alors tout ira bien. »

Si le plus jeune fut surpris, il ne parut pas mécontent, esquissant un nouveau sourire jovial et lumineux, gloussant machinalement en hochant de la tête, l'air passablement d'accord avec son supérieur. Après tout, c'était un point sur lequel ils s'entendaient bien : ceci expliquant sans doute qu'en dépit de leurs personnalités très différentes, ils arrivaient toujours généralement à un consensus. L'enthousiasme de ce dernier le rassurait, de temps à autre ; il ne connaissait pas, après tout, beaucoup de personnes aussi enjouées que lui quant à la création.
Toutefois, il avait autre chose à faire, et il sentait déjà la pression de Clive le rappelant sur un plan de réalité supérieure, sans doute pour une affaire somme toute peu grave mais qui nécessitait qu'il soit présent. Après avoir poussé un soupir de déplaisir et avoir passé une main dans ses propres cheveux, il esquissa finalement un très léger sourire, plus amical et formel qu'autre chose, cette fois.

« Je ne te dérangerais pas plus longtemps. Merci à toi de m'avoir accueilli aujourd'hui. »

Il sait que ce n'est pas aisé pour l'autre, après tout. Natsume ne semble pas contre : et vu la fatigue de cette entrevue, ce n'est pas si étonnant, au fond. Pour cette raison, il se contente de passer une main sur l'épaule de son cadet pour le saluer, se retournant tranquillement pour se préparer à partir.

« Oh, et Phanuel... Cesse donc de te cacher, je sais que tu es là. »

Il claqua machinalement des doigts. S'en suivit la brisure d'un branchage, puis le son d'une chute sourde, menant tout droit à un « plaf » d'eau giflée contre le sol. Au delà des grognements d'agacement qu'il entendit, le rire amusé du gardien du jardin lui donna au moins l'impression, lorsqu'il quitta les lieux, que la situation était à peu près normale.


Dernière édition par Segnif le Lun 6 Jan - 2:39, édité 1 fois
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MessageSujet: Flashbacks   Flashbacks (Natsu, passé) Icon_minitimeDim 21 Juil - 17:06


FB II

« Tais-toi. »

La commande est sèche, brutale, directe. Elle est sifflée comme une réprimande courroucée, comme un rappel à l'ordre si soudain et si autoritaire qu'il en est le premier surpris, n'y ayant jamais eu à faire auparavant. Surpris, ses yeux s'écarquillent et il s'immobilise, tendu de tout son corps devant la vision du regard noir de Clive, devant la tension dans ses épaules, devant la sécheresse de son ton qui ne laisse aucune place à une possible contradiction. Un frisson de peur passe de la base au sommet de son échine face à cette soudaine acerbité, aussi inattendue que violente. Un nœud s'est formé dans sa gorge et dans son ventre, serrant d'une manière suffisamment acharnée pour que cela en devienne douloureux, relâchant des éclats brûlants dans sa gorge. Quelque chose au fond de lui vient d'être secoué brutalement, comme un deuxième coup après un premier qui avait déjà fait tressauter sa grâce d'horreur.
Il l'avait senti l'éloigner d'un coup sec. Sa main s'était subitement saisie de son épaule et il l'avait tiré vers l'arrière, les ailes dressées en avant pour l'y dissimuler derrière. Il ne s'était pas attendu à un pareil mouvement : il n'avait même pas remarqué, jusque là, la présence de l'archange de la force. Ce dernier, dès lors qu'il avait commencé à parler, toutefois, l'avait agrippé fermement et l'avait violemment renvoyé derrière lui, le regard incendiaire et la voix plus claquante qu'un fouet. Ils avaient disparu dans un battement d'ailes, trop rapide pour que le cadet ne puisse même songer à s'éloigner. Il avait mis un temps à réaliser qu'ils étaient maintenant dans le jardin. D'autre part, il avait été tellement surpris par l'approche soudaine de son aîné qu'il n'avait même pas su comment réagir : l'idée de se protéger n'était pas montée à sa tête, car Clive n'aurait jamais été une menace, à ses yeux. Désarçonné, il peine encore à se relever, crispé de tous ses membres, le regard rivé sur la silhouette de son supérieur. Ce dernier siffle, les sourcils froncés, ses ailes d'argent bloqués dans un arc crispé.

« Pas un mot de plus. Tu es déjà chanceux de ne pas avoir été remarqué. »

Natsume tressaille, l'angoisse lacérant son ventre. Il ne saisit pas. Quelque chose cloche. Quelque chose doit clocher. Ça n'a pas de sens. Clive ne devrait pas le regarder comme ça. Lui parler comme ça, comme il avait commis un crime, comme si il était un ennemi. Rien, à ses yeux, ne vaut la colère qu'il sent maintenant dirigée vers lui.
Ou en tous cas, il doit s'agir de colère. Il ne comprend pas ce qui peut susciter une pareille réaction, alors, ayant repris un peu de son assurance, il se relève en titubant, encore sonné par la puissance du heurt de la grâce de son supérieur contre la sienne. Relevant le regard, il se force à croiser celui de son aîné, y cherchant une quelconque forme de compréhension.

« Mais il a raison ! »

D'ordinaire, Clive était celui qui l'écoutait le plus. Il le laissait parler quand quelque chose le tracassait, quand il ne savait jamais trouver les mots et qu'il prenait souvent de longues pauses pour finir une phrase, quand il ne comprenait pas quelque chose et qu'il avait besoin, de temps en temps, de ses éclairages. Malgré son rang et son prestige supérieur, il l'écoutait comme si cela n'avait aucune importance, et il jamais il ne le rabaissait quand venait des moments où il faisait, inexorablement, des erreurs. Alors, sur le moment, il ne comprend pas. Le comportement du noiraud va à l'encontre de tout ce à quoi il aurait pu s'attendre. Il aurait cru, au contraire, qu'il le soutiendrait, serait en accord et se joindrait à lui, même. Il tente donc d'appeler à sa raison, à cette conception commune qu'il croit qu'ils ont, mais il ne reçoit en échange qu'un regard dur et une mine sombre.

« Natsume ! »

Encore une fois, il le reprend comme si cette simple parole était une insulte, quelque chose qu'il devrait même avoir honte d'avoir prononcé. Ses épaules sursautent un peu et ses ailes, inconsciemment, se recroquevillent : elles ont l'air incroyablement petites, face à celles du plus âgé, qui les déploie librement maintenant, comme pour l'intimider et lui dire de faire allégeance. Le nœud dans sa poitrine se vrille encore un peu, mais il ravale sa salive, haussant même le ton, des vagues pénibles secouant sa poitrine.

« Tu penses que c'est juste ? Que c'est ça, le bien commun ?! »

Sa voix craquelle un peu sous le coup de la frustration. Ses dents se serrent et d'un geste de la main, il balaie l'air, comme pour désigner quelque chose qui n'est pas là. Il veut le faire réagir, faire quitter cette mine sombre de son visage, voir de la compréhension sur ses traits, dans le creux de son regard bleu qui s'est fait plus dur que de la glace. Leur avis ne sont pas si différents, d'ordinaire, du moins, c'était ce qu'il pensait jusqu'à maintenant : et l'idée qu'il puisse effectivement y avoir divergence est quelque chose qui le secoue plus qu'il aurait pensé. L'idée que le petit monde dans lequel il vit puisse ne pas être ce qu'il s'était imaginé le fait frissonner d'une peur glaçante, faisant frémir sa voix d'une note désespérée.

« Tu veux... Tu veux vraiment faire ça ?! »

Son regard s'abaisse un peu. Il n'arrive pas à y croire. Il ne veut pas y croire.
Il n'arrivait déjà pas à croire ce qu'il avait pu entendre lorsque les ordres célestes étaient arrivés à leurs oreilles. Lorsqu'il s'était perçu que personne n'avait rien dit et que tous étaient tombés dans un silence de soumission, il avait regardé à se droite, puis sa gauche, puis derrière lui et enfin, devant lui. Une tension de pierre s'était installée, mais personne ne pipait mot. Faust, silencieusement, s'était agenouillé, dans un signe d'obéissance absolue, incitant les autres à le faire à sa suite. Lentement, les rangs s'étaient abaissés, petit à petit. Natsume avait cru que personne ne parlerait. Lui-même n'aurait pas réussi à le faire. Sa colonne vertébrale s'était comme statufiée, ses traits s'étaient crispés, et il avait senti dans son ventre cette déchirure violente et froide, mais la douleur refusait de s'exprimer d'une quelconque manière, ne serait-ce que dans une parole. Les lèvres closes en une ligne droite et serrée, il n'arrivait même pas à agiter son corps pour exprimer quoi que ce soit. Il attendait, quelque part, juste l'once d'une preuve quant au fait qu'il n'était pas dans le tort de réagir ainsi.

« Ce que je pense n'a aucune importance. »

La réplique se veut rapide et sèche, mais elle arrive trop tard, trop lentement, pour que Natsume y croit sincèrement. L'inflexibilité de Clive ne lui donne pas l'impression d'être sincère. Pourtant, il persiste, il insiste, il tient bon, face à ce qui ne devrait pas faire sens. Confus, l'archange mineur plisse les sourcils, les traits déformés dans une confusion peinée, incapable de comprendre.

« Mais tu... Tu es la Vérité, tu dois forcément... »

Sa voix se fait presque plaintive. Il espère une réponse, quelconque, qui soit susceptible de donner un sens à ce qui n'en a pas à ses yeux. Quelque chose pour le rassurer, comme il avait pu le faire tant de fois auparavant lorsque ses pensées devenaient trop confuses, trop emmêlées et trop intenses pour qu'il ne puisse suivre. Lorsque sa sensibilité se révélait trop dure à supporter, Clive parvenait toujours à le ramener lentement vers la terre ferme, sans jamais le presser, et quelque part, sûrement qu'il en avait développé une forme de dépendance qui s'exprimait maintenant aujourd'hui dans cette sensation de trahison amère au fond de son ventre.

« Je suis la Vérité, oui. Une Vérité. »

Sa voix est plus calme, mais Natsume préférait encore son timbre autoritaire à cette lassitude qui suinte de ses paroles, de son ton, ou même de ses yeux. Ses ailes se sont un peu  abaissées, mais il n'a pas bougé, considérant son vis-à-vis avec fatigue.

« Et la vérité que je peux te dire est que tu étais sur le point de commettre un blasphème aux yeux de tous. 
- Je n'ai pas... Je pense juste que c'est mal !
- Et tu n'a pas à le dire. »

Clive soupire, sans excuse dans la voix, hochant négativement de la tête comme pour signifier son désaccord. Natsume, face à cela, sent ses tripes se retourner. Immobile, il a comme l'impression qu'il vient d'être giflé : la sensation est humiliante, brûlante dans sa poitrine, désagréable dans tout son corps, traversé par un frisson aussi brusque que froid. Inconsciemment, ses yeux s'abaissent et il ravale nerveusement sa salive, se débattant piteusement contre la honte qui s'est mise à germer en lui.
Une main douce, pourtant, s'est posée sur son épaule. Elle est ferme, mais son contact est suffisamment léger pour qu'il soit conscient qu'elle tente de venir en amie. Il ne s'y était pas attendu, alors il sursaute, mais ne relève pas le regard, fixant ses pieds comme pour tenter d'y trouver une solution à ce qui le secoue actuellement. À l'heure actuelle, pourtant, Natsume a la sensation qu'elle lui brûle la peau : que chaque contour de ses doigts est une pression perforante contre son articulation. Le cadet se tend de tout son corps, entièrement plaqué sur la défensive sans même s'en rendre compte.

« Ce n'est pas ce qui est attendu de toi. »

La voix de Clive s'est fait douce, tranquille. Il lui parle comme si il essayait de raisonner quelqu'un d'irresponsable, ou qu'il tentait de le rassurer. Même son regard s'est adouci, retrouvant la familiarité affectueuse qu'il lui offrait lorsqu'il venait chercher ses lumières pour éclairer la torpeur de ses propres craintes. Il avait toujours été dévoré par l'hésitation, les questions et la force de ses propres troubles, alors Clive avait souvent été, à ses yeux, comme une lumière rassurante dans l'ombre.
Aujourd'hui, toutefois, pour la première fois, elle lui semble étrangement terne.

« Mais je... Je ne suis pas le seul, à le penser. Tu l'as bien vu ! »

Il proteste encore, mais son ton est marqué par une hésitation presque piteuse, ses yeux brillant de lueurs inquiètes et craintives. Il essaie, encore, de susciter une quelconque réaction chez son vis-à-vis. Pourtant, il n'arrive pas encore à s'opposer pleinement à ce que l'autre lui dit, comme si il était convaincu qu'il ne s'agissait que d'une question de mots. Que Clive ne réagisse pas à ses paroles était encore une chose : Natsume pouvait accepter l'idée qu'il soit trop « naïf », trop « déconnecté » des choses, mais il ne saisissait pas pourquoi il n'aurait pas écouté l'idée d'un de ses semblables.
Il l'avait vu, pourtant. Il l'avait entendu, aussi. Lorsque tous avaient commencé à s'agenouiller en soumission aux ordres célestes, imitant Faust et son obéissance silencieuse, le dernier archange majeur n'avait pas bougé d'un pouce. Crispé de tout son corps, incapable de réagir, Natsume avait fixé son regard vers ce dernier, espérant sans oser se l'avouer qu'il ne soit pas en train d'imaginer son immobilité. Quelque chose dans son ventre s'était noué violemment, l'angoisse vrillant ses tripes, jusqu'au moment même où les mots avaient fusé entre le premier et le dernier des quatre.

Il avait cru que tout cela était une création de son esprit, au départ. Pour lui, il était impossible de croire à la virulence de Faust, à son aplomb autoritaire, à la force de sa voix qui n'acceptait aucun des arguments de son camarade. Il semblait si différent de celui qui les écoutait toujours avec attention et qui ne les jugeait jamais qu'avec compassion ; la grâce enflammée par un courroux impétueux, l'éclat de sa puissance avait résonné parmi chacun d'entre eux. Paniqué, Natsume avait jeté un regard presque implorant vers Elliott, mais ce dernier ne semblait pas vouloir soutenir son collègue.
Parmi les archanges mineurs, aucun autre d'entre eux ne semblait vouloir réagir. Tous étaient fixés sur l'échange virulent entre leurs supérieurs respectifs, immobilisés tant par la hiérarchie que par la crainte et la stupeur face à ce qui était en train de se dérouler devant eux. Les principautés, déjà, murmuraient leur incompréhension entre eux ; les séraphins s'étaient fait muets, tandis que les chérubins, partagés entre leur soumission due et le respect qu'ils avaient pour leur meneur, échangeaient des regards craintifs. Personne n'osait le dire, mais petit à petit, ils étaient bien forcés de réaliser que ce qu'ils entendaient ressemblait presque à de la désobéissance. Ils n'en avaient jamais considéré la possibilité, et qu'elle vienne d'un des quatre était encore plus improbable. Que l'un des piliers du monde tel qu'ils le connaissaient s'oppose à la volonté céleste, tant par ses mots et que par son refus de se soumettre aux ordres du premier archange, les bloquaient tous dans une stupéfaction muette. Ils n'auraient pas osé prononcé un mot : nul n'aurait pu savoir ce qui se passerait si une sanction tombait sur eux.
Aucune sanction n'avait encore jamais été donnée, après tout.

La tension crépitait presque dans l'air. La main sur son épée de feu, Faust avait répété son ordre une dernière fois, l'avertissement explicite dans son ton que dans sa posture. La force de l'archange du bien, pleinement déployée, avait fait frémir la grâce de la majorité ici présente, dont Natsume n'était pas une exception. La sienne était après tout, parmi les archanges mineurs, la plus faible. Ses propres ailes n'étaient même pas encore pleinement développées, signe d'un retard dont il n'avait de cesse d'entendre les reproches parmi ses camarades.
Toutefois, quelque chose au fond de lui-même lui avait fait faire un pas vers l'avant, la voix se haussant instinctivement, le regard levé vers la silhouette de son supérieur. Il ne se souvenait plus de ce qu'il avait dit, mais à peine avait-il eu le temps de soutenir les propos du quatrième archange majeur que le regard surpris de Faust s'était posé sur lui, durant une seconde, avant que quelque chose ne le tire subitement vers l'arrière. Il n'avait compris quelques secondes plus tard qu'il s'agissait de Clive, qui le fixe maintenant avec une fermeté glaciale. Ses tentatives de le convaincre ne semblaient aller nulle part, et cette constatation ne faisait que faire croître le nœud glacé dans son ventre.

« Ceci ne te regarde pas. Faust lui fera entendre raison. »

Mais comment... Mais comment est-ce qu'il peut en être certain?
Il parlait avec une telle certitude que le cadet en fut désarçonné, fixant sur lui un regard empli de confusion. Au delà de l'humiliation qu'il ressent, il y aussi cette impression que rien de tout cela n'a de sens. Il ne sait pas si c'est de l’orgueil, et à vrai dire ce n'est pas sa principale préoccupation maintenant, mais il a la sensation de ne plus être dans quelque chose d'à peu près raisonnable. Ou du moins, il a la sensation qu'ils ont tous perdu la raison. Décontenancé, l'expression marquée par une incompréhension totale, accompagnée d'un ébahissement qui se traduit dans son ton déconcerté.

« Et si ça ne marche pas ? Qu'est-ce qui se passera ? »

Il doit avoir une réponse. Clive a toujours une réponse. L'idée qu'il n'y ait pas de réponse l'effraie assez pour que le froid dans sa poitrine se crispe soudainement. Le regard fixé sur le visage fermé du plus âgé, il est persuadé de le voir s'assombrir, des lueurs d'hésitation dans le creux de son regard doré. La mâchoire serrée, ses épaules se sont tendues et il siffle presque ses propos, les doigts crispés.

« Je n'en sais rien. Tu es heureux de le savoir ? »

Acerbe, il perd toutefois de son acidité au fur et à mesure que sa phrase continue, remplacée par une lassitude amère. Natsume ravale sa salive, un mélange de tristesse et d'inquiétude piégeant sa cage thoracique dans une constriction douloureuse. Clive semble inquiet, maintenant que sa mine dure se relâche quelque peu, et l'archange mineur se demande, avec une certaine incertitude, si ce n'est pas lié à son comportement actuel.

« Je ne sais pas ce qui se passera. Ne me fais pas l'apprendre. »

Son ton est las. Si son regard vaut figure d'avertissement, Natsume y voit clairement une lueur de peur. Désarçonné, le cadet ouvre la bouche sans arriver à parler, la refermant quelques secondes après. Clive lui tourne lentement le dos, gardant tout de même un œil sévère sur lui.

« Tu resteras ici jusqu'à nouvel ordre. N'ouvre à personne. »

Si le cadet voulait l'arrêter, il n'en a pas le temps. L'aîné disparaît dans un battement d'ailes vif et sec, giflant l'air contre son visage, et laissant Natsume dans un silence total. Le calme du jardin, tout à coup, lui semble étrangement pesant.
Et si il retrouve seul, une nouvelle fois, avec ses pensées confuses.
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